En 1881, le « Djamila », boutre sous pavillon français, fut capturé avec 94 esclaves à son bord par la marine britannique au large de Zanzibar sur la côte orientale de l’Afrique dans l’océan Indien occidental. Cet incident, loin d’être anecdotique, révèle l’importance de la traite dans cet espace maritime durant la seconde moitié du XIXe siècle.
En dépit de sa vigueur, cette traite est souvent restée méconnue, comme dans l’ombre de celle de l’Atlantique. Cette méconnaissance est liée au trop peu d’archives que ce trafic dans l’océan Indien laissa dans son sillage. Moins bien documenté que l’Atlantique, il est d’ailleurs presque impossible d’estimer l’ampleur véritable de cette traite. On doit se limiter à des estimations aux ordres de grandeur approximatifs. On estime qu’entre 800 000 et plus deux millions de femmes, d’hommes, et d’enfants furent l’objet de ce trafic sur les côtes de l’Afrique Orientale au cours de l’ensemble du XIXème siècle.
Comme le montre le cas du Djamila, les boutres de Zanzibar ou d’Oman, ces voiliers gréés d’une ou deux voiles triangulaires, devinrent, pour les européens, l’incarnation de cette « dernière traite ». On oublia alors bien vite que les européens avaient dominé cet « infâme trafic » durant la première partie du siècle avant de s’engager dans la voie de son abolition.
Si cette traite fut combattue à son apogée par les puissances coloniales européennes, elle ne déclina pourtant que tardivement. Ce trafic ne connut en effet son véritable crépuscule qu’après la Grande Guerre, lorsque le commerce des dattes et des perles d’Arabie s’écroula sous l’effet de la mondialisation des échanges.